Conférence de Nagoya sur la biodiversité: la Suisse ne doit pas s’y rendre les mains vides
11 octobre 2010
La Déclaration de Berne (DB), Pro Natura et l’Association suisse pour la protection des oiseaux ASPO/BirdLife Suisse craignent que la Conférence de Nagoya sur la biodiversité, qui se déroulera durant la seconde moitié du mois d’octobre 2010, ne connaisse le même sort que le sommet de Copenhague sur le climat. L’échec menace si le financement des mesures internationales urgentes en faveur de la diversité biologique n’est pas assuré. De l’avis des trois organisations, la Suisse en a fait beaucoup trop peu jusqu’à présent pour aider à prévenir un tel échec. Le 1er octobre, le Conseil fédéral a bien exigé pour cette conférence des «objectifs ambitieux, réalistes, concrets et mesurables», mais il n’a pas précisé quelle serait la contribution financière de la Suisse à leur réalisation. Il a au contraire soumis toute garantie de contribution à des conditions irréalistes, par exemple un calcul exact de la valeur économique de la biodiversité.
Les Etats de la planète ne consacrent que 8 à 12 milliards de dollars à la préservation de la diversité naturelle. Or, 45 milliards de dollars sont requis uniquement pour prendre soin des écosystèmes déjà protégés. La valeur des prestations de la biodiversité, rien que dans les aires protégées de la planète, est estimée à 500 milliards de dollars par an. Les pays en développement, dont la diversité biologique bénéficie massivement aux pays industrialisés, réclament une hausse radicale des contributions. Sans quoi ils se voient dans l’impossibilité de réaliser les objectifs prévus par la Convention sur la biodiversité (CBD).
En outre, un nouveau protocole d’application de la CBD doit être adopté afin de réglementer de façon contraignante l’accès aux ressources génétiques et la répartition des avantages résultants de leur utilisation (access and benefit sharing, ABS). La Suisse doit se mobiliser pour que soient prises des mesures efficaces empêchant toute utilisation des ressources génétiques et des savoirs traditionnels contraire à la CBD. Avec la question du financement, l’adoption d’un accord ABS est, pour les pays en développement, une condition sine qua non pour accepter un plan stratégique ambitieux tel que le réclament la Suisse et d’autres pays industrialisés.
Afin d’éviter un échec de la Conférence de Nagoya sur la biodiversité, la DB, Pro Natura et l’ASPO/BirdLife Suisse attendent du Conseil fédéral qu’il n’envoie pas sa délégation au Japon les mains vides, mais lui donne pour mandat de prôner et d’approuver une augmentation substantielle des investissements en faveur de la biodiversité jusqu’en 2020.
La Suisse a ses propres devoirs à faire
Même en Suisse, les ressources et stratégies décidées à ce jour ne permettront pas à notre pays d’atteindre les objectifs 2020 pour la biodiversité. Le bilan officiel publié voici une semaine montre que la Suisse n’a encore atteint aucun des onze objectifs qu’elle aurait dû réaliser à la fin de cette année. Elle en a «partiellement réalisé» cinq ; quant aux six autres, elle est encore très loin du but. Il est ainsi impératif d’agir également à l’intérieur de nos frontières. Pro Natura et l’ASPO/BirdLife Suisse ont d’ailleurs lancé récemment une pétition «pour protéger la biodiversité avec des moyens suffisants». Celle-ci demande au Parlement et au Conseil fédéral d’adopter une stratégie nationale efficace sur la biodiversité et de dégager les moyens nécessaires pour protéger la nature. Ce n’est que si elle est prête à faire ses propres devoirs que la Suisse sera crédible et convaincante à Nagoya.