En marge de la conférence du secteur des matières premières à Lausanne, une étude appelle à davantage de transparence.
24 avril 2012
Le fait que le Financial Times (FT), le principal quotidien international de référence en matière financière, organise son premier «Global Commodities Summit» au bord du Léman démontre, s’il en était encore besoin, le rôle de premier plan joué par la place helvétique du négoce des matières premières. Pendant deux jours, les dirigeants de Vitol, Glencore, Trafigura et des autres géants du négoce s'entretiendront officiellement du «Super-Cycle [des matières premières] et des nouvelles tactiques dans un marché en évolution». En coulisses, toutefois, il sera avant tout question des pressions croissantes de l'opinion publique et du monde politique sur ce secteur problématique tant pour les Etats riches en matières premières que pour la Suisse, d’où le négoce est organisé. Par la voix du Secrétariat d'Etat aux questions financières internationales (SFI), la Suisse officielle ne s'exprimera toutefois que pour exprimer sa volonté de rester le lieu d'accueil le plus attractif pour ce secteur globalisé.
Swiss Trading SA – la Suisse, le négoce et la malédiction des matières premières, publié en 2011 par la DB, dévoile les pratiques commerciales de plus en plus décriées de ce secteur puissant et discret. L’édition allemande du FT elle-même recommande vivement la lecture de ce livre dont une 2e mouture actualisée est disponible. Basé sur des enquêtes exclusives et des recherches approfondies, cet ouvrage offre la première analyse de ce secteur économique névralgique. Il explique pourquoi les pays du Sud riches en ressources naturelles restent pauvres, alors que les négociants en matières premières établis en Suisse engrangent des milliards de bénéfices.
Sous le titre «Citizens‘ Oil», RWI publie aujourd'hui les conclusions d’une étude des transactions pétrolières menées dans onze Etats. Cette étude montre que l’opacité des transactions effectuées entre les gouvernements des pays d’origine de l’or noir, les groupes pétroliers étatisés et les négociants indépendants nuisent aux populations locales, qui sont en fait les propriétaires de ces ressources. RWI demande aux négociants, basés de plus en plus souvent entre Genève et Zoug, de publier régulièrement et en détail l’ensemble des versements effectués pour l'achat de pétrole aux instances étatiques, y compris aux entreprises pétrolières d'Etat.
Cet appel à davantage de transparence trouve toujours plus d’écho, même en Suisse, où les entreprises de négoce en matières premières constituent un risque politique à la hauteur des énormes profits dégagés par ce secteur en pleine croissance. Le Conseil fédéral doit impérativement prendre ses responsabilités et utiliser la marge de manœuvre qu’il lui reste pour éviter que les avantages comparatifs dont bénéficient les négociants en Suisse ne se transforment rapidement – comme ce fut le cas pour la place financière – en mauvaise réputation tenace.