La restitution des fonds Moubarak dans une impasse
Lausanne/Zurich, 25 octobre 2017
En trente ans de règne, l’ancien président et ses proches sont accusés d’avoir détourné des sommes colossales par le biais d’un vaste système de corruption. Le 11 février 2011, le jour de la chute d’Hosni Moubarak, le Conseil fédéral a ordonné le gel de ses avoirs et de ceux de ses proches. Peu après, le MPC a ouvert des procédures à l’encontre de ce clan. Afin de saisir leurs avoirs, les autorités ont misé sur les mécanismes de l’entraide internationale en matière pénale. A ce titre, les procureurs suisses et égyptiens ont échangé plus de 70 demandes d’entraide entre 2011 et 2016.
Cette voie n’a toutefois pas permis de prouver l’origine illégale des fonds bloqués en Suisse et de les confisquer, car l’appareil judiciaire égyptien n’a pas été en mesure de prouver leur illicéité. Les autorités égyptiennes ont par ailleurs adopté des accords extra-judiciaires de réconciliation, amnistiant des membres de l’entourage de Moubarak. Ces accords ont abouti, en décembre 2016, à la levée des séquestres imposés depuis 2011 sur 180 millions de francs. En août 2017, le MPC a discrètement mis un terme aux procédures d’entraide ouvertes avec l’Egypte, sans que celles-ci n’aient porté leurs fruits. On peut craindre que le reste des avoirs douteux soient bientôt laissés à la disposition d’anciens alliés du régime, en dépit des espoirs de la population égyptienne.
Depuis plus de dix ans, Public Eye insiste sur la nécessité de disposer d’alternatives permettant de saisir des avoirs manifestement illicites lorsque les mécanismes de l’entraide judiciaire sont déficients ou que celle-ci est impossible. Comme nous le montrions en 2013, de tels cas sont fréquents. Ces arguments ont été en partie entendus. En 2016, la loi sur les valeurs patrimoniales d'origine illicite (LVP) entrait en vigueur, présentée par les autorités fédérales comme la preuve de leur politique progressiste en matière de restitution d’avoirs de kleptocrates. Cette loi devrait permettre de saisir leurs biens lorsque l’entraide pénale ne fonctionne pas. Son usage est toutefois limité par des conditions si restrictives que les autorités suisses ont exclu en août passé d’y recourir dans le cas égyptien. Dans ces conditions, l’échec de la restitution des fonds Moubarak semble programmé.
Plus d’informations sur la restitution des fonds Moubarak ici ou auprès de :
Olivier Longchamp, responsable finances et fiscalité, Public Eye, +41 21 620 03 09 olivier.longchamp@publiceye.ch
Géraldine Viret, responsable communication, Public Eye, +41 21 620 03 05 geraldine.viret@publiceye.ch