Starbucks utilise son programme de durabilité à des fins d’optimisation fiscale agressive
Communiqué de presse d'Alliance Sud et Public Eye, 28 mars 2025
C’est une pratique bien connue: les multinationales exploitent fréquemment les droits de brevet, de marque ou de logiciel pour déplacer artificiellement leurs profits vers des juridictions à faible fiscalité, plutôt que de les déclarer là où ils sont réellement générés. Dans son rapport «Starbucks’ Swiss Scheme: ‘Fair’ Trading or Global Tax Dodge?», l’ONG CICTAR révèle comment Starbucks utilise son programme censé garantir un commerce écologique et équitable pour transférer des bénéfices (profit shifting) vers la Suisse à des fins d’optimisation fiscale.
Starbucks gère l’ensemble de son commerce intragroupe de café vert via son bureau de négoce lausannois Starbucks Coffee Trading Company Sàrl (SCTC). Depuis 2011, la multinationale y a enregistré un total de 1,3 milliard de dollars de bénéfices, grâce à des marges exceptionnellement élevées sur les ventes intragroupes de café vert, atteignant jusqu'à 18%, et à un taux d’imposition très faible en comparaison internationale ne dépassant pas 14%. En 2015, la Commission européenne avait déjà critiqué ces pratiques. Starbucks avait justifié ces marges élevées par les coûts de son programme de certification C.A.F.E. Practices, mais la Commission européenne avait estimé que cette justification était infondée.
Le rapport de CICTAR confirme que Starbucks persiste dans cette stratégie, continuant ainsi à transférer d’importants bénéfices à Lausanne, au détriment des caisses publiques dans les pays de production et de consommation. Les producteurs ne souffrent pas seulement au niveau financier: Reporter Brasil révélait, en novembre 2023, que des plantations certifiées par C.A.F.E. Practices au Brésil avaient recours au travail des enfants ainsi qu’au travail forcé. «Le fait que Starbucks utilise ce programme de durabilité pour transférer des bénéfices – et donc des recettes fiscales – des pays à faible revenu vers l’Europe est un affront aux personnes qui cultivent et cueillent le café», estime Carla Hoinkes, experte agriculture chez Public Eye. «Au lieu de promouvoir le commerce équitable, Starbucks perpétue ainsi les injustices mondiales».
Dominik Gross, expert en politique fiscale chez Alliance Sud, ajoute: «Malgré l’instauration d’une imposition minimale par l’OCDE, la Suisse et le canton de Vaud restent attractifs pour les multinationales adeptes de l’optimisation fiscale.» Mais ce n’est pas tout: des cantons à faible imposition, comme Zoug, Bâle-Ville, Lucerne ou Schaffhouse, veulent redistribuer les recettes fiscales minimales supplémentaires aux entreprises qui paient l'impôt minimal. Reste à savoir si le canton de Vaud adoptera également de telles mesures. «Si les autorités politiques suisses n’agissent pas avec fermeté, des sociétés comme Starbucks pourraient en profiter», conclut Gross.
Des photos de l'action de protestation à Lausanne seront disponibles ici.
Plus d’informations auprès de:
- Dominik Gross, expert en politique fiscale, Alliance Sud: dominik.gross@alliancesud.ch, +41 78 838 40 79
- Carla Hoinkes, experte en agriculture, Public Eye: carla.hoinkes@publiceye.ch, +41 44 277 79 04