En direct depuis Hongkong
15 décembre 2005
On parle effectivement beaucoup de développement à Hongkong. L’Union européenne, les Etats-Unis et le Japon assurent avoir l’intention de réunir de grosses sommes d’argent pour atténuer d’éventuels effets négatifs des libéralisations commerciales pour les pays en développement. Cet argent doit aussi être investi dans des infrastructures nécessaires au commerce mondial. L’Union européenne compte aussi ouvrir ses marchés aux pays en développement les plus pauvres, pour tous leurs produits et sans exception : c’est ce que Peter Mandelson, le commissaire européen au commerce, a affirmé dans une réunion qui vient d’avoir lieu.
De nombreux pays du Sud, ainsi que des ONG actives dans la politique de développement, critiquent toutefois fortement ce « paquet du développement »:
1. Les propositions définies comme « paquet du développement » concernent seulement les 50 pays les plus pauvres de la planète. On essaie ainsi d’opposer les pays en développement les uns aux autres.
2. Les sommes promises seront liées à des conditions qui correspondent à la politique de libéralisation menée par le Fonds monétaire international.
3. Les problèmes fondamentaux des accords à négocier au sein de l’OMC ne sont pas abordés, au contraire : les pays industrialisés posent des exigences maximales dans le domaine des services et demandent des baisses drastiques des droits de douane sur les produits industriels. C’est également ce que le conseiller fédéral Joseph Deiss a souligné hier lors d’une rencontre avec les médias et les ONG suisses.
La rhétorique du développement pourrait avoir un effet boomerang. Le Brésil, l’Inde et la Chine ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne sont pas disposés à accepter les propositions qui sont sur la table. L’issue de la conférence est ainsi encore totalement ouvert.
Tandis que la tension monte dans les salles de négociation, l’ambiance est colorée, joyeuse et animée au parc Victoria. Différents réseaux (tels que le Pesticide Action Network des pays asiatiques et du Pacifique ou la coalition pour la souveraineté alimentaire) ont ainsi organisé aujourd’hui un « tribunal public » dans lequel des paysans ont dénoncé les effets négatifs de l’accord de l’OMC sur l’agriculture. Des paysans cambodgiens ont notamment évoqué les afflux d’importations bon marché: depuis que leur pays est devenu membre de l’OMC il y a deux ans, ils ne peuvent plus vendre leurs propres choux et carottes. Ces légumes sont désormais importés au Cambodge depuis le Vietnam et la Thaïlande. Des manifestations, en général colorées et pacifiques, ont lieu chaque jour. Quelques rares escarmouches ont opposé manifestants et policiers, dont les images dominent les médias.
La Déclaration de Berne collabore avec des centaines d’organisations. Par ces alliances, on essaie d’offrir aux délégués des pays du Sud un soutien qui leur donne suffisamment d’assurance pour oser refuser des propositions inacceptables. Le commissaire européen au commerce, Peter Mandelson, a d’ailleurs affirmé que sans le travail de nombreuses ONG, la voix des pays du Sud se ferait encore moins entendre.