En dépit des objectifs climatiques, le Conseil national rejette une pétition demandant l’abandon du commerce de charbon

Le 14 juin, le Conseil national a rejeté une pétition déposée par Public Eye visant à mettre fin au commerce, depuis la Suisse, de la source d’énergie la plus polluante au monde. Les sociétés helvétiques négocient 40% du charbon mondial et extraient plus de 500 millions de tonnes de charbon par an dans leurs propres mines. Le Parlement a manqué l'occasion de fixer des limites claires au secteur du charbon, néfaste pour l’environnement, et de mettre le Conseil fédéral face à ses responsabilités en matière de politique climatique. Une interpellation parlementaire demande désormais aux autorités de clarifier les objectifs de réduction pour les négociants suisses en charbon, afin que leurs activités lucratives ne sabotent pas l’Accord de Paris sur le climat.

Le charbon est la source d'énergie la plus polluante au monde. Malgré les objectifs de réduction fixés par l’Accord de Paris, il est en plein essor: en 2023, plus de 8,7 milliards de tonnes de charbon ont été extraites, soit plus que jamais dans toute l'histoire de l'humanité. Fin 2022, Public Eye révélait que 245 sociétés suisses étaient actives dans l’extraction et le négoce de cette «bombe climatique», et que les émissions indirectes de C02 qu’elles généraient étaient supérieures aux émissions annuelles des États-Unis.

Avec sa position dominante dans le commerce de charbon, la Suisse dispose d'un levier important en matière de politique climatique et d'une responsabilité particulière. La pétition «Stop charbon», déposée en juin 2023 par Public Eye avec 25 104 signatures, demandait au Conseil fédéral et au Parlement d'assumer enfin cette responsabilité. Le 14 juin, elle a été rejetée par le Conseil national par 123 voix contre 75.

En l’absence d'engagements clairs, les sociétés actives dans le charbon continueront de retarder la nécessaire sortie de cette source d’énergie climaticide. En tête de liste:  Glencore, responsable à elle seule de 9% des exportations mondiales de charbon destiné aux centrales électriques. Le plan de transition climatique adopté lors de l'assemblée générale du groupe zougois, en mai dernier, représente un bond en arrière et revient sur les promesses faites jusqu'ici concernant des objectifs de réduction conformes à l'Accord de Paris.

Le Conseil fédéral met volontiers en avant la promesse d’une politique climatique progressiste, mais ignore systématiquement les activités charbonnières des négociants en matières premières installés en Suisse. En décembre 2023, la Suisse a rejoint le «club climat» particulièrement ambitieux du G7. Ce groupe de grands pays industrialisés a récemment décidé d'abandonner la production d'électricité à partir du charbon d'ici 2035. En 2021, déjà, la Suisse s'était engagée, lors de la Conférence mondiale sur le climat à Glasgow, à abandonner le charbon pour la production d'électricité. Le Conseil fédéral doit décider d'objectifs de réduction contraignants pour la place de négoce du charbon, sinon il met en jeu la crédibilité et la réputation de la Suisse.

La Cour européenne des droits de l'homme a également exigé des objectifs et des mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans son arrêt sur la plainte des Aînées pour le climat. Une interpellation de la conseillère nationale Franziska Ryser (Les Vert·e·s/SG) demande maintenant au Conseil fédéral de tenir également compte des émissions provenant du commerce suisse de charbon.

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