Responsabilité des multinationales: un Conseil fédéral inactif et un lobby des multinationales qui ment
Lausanne/Zurich, 14 décembre 2018
En 2016, le Conseil fédéral avait adopté un Plan d’action national (PAN) sur la mise en oeuvre des Principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme. Ce dernier s’était avéré décevant à tous les égards. En effet, au lieu d’y ancrer des objectifs contraignants en termes de droits humains, la Suisse s’était bornée à effectuer un inventaire des «mesures» déjà existantes. Le rapport de mise en oeuvre publié aujourd’hui nous sert toujours la même rengaine : le respect des droits humains devrait être volontaire pour les multinationales.
Même l’étude mandatée par le Conseil fédéral comme base pour la rédaction de ce rapport tire un bilan accablant. L’entreprise britannique de consulting «twentyfifty» est parvenue à la conclusion que les mesures prises par la Confédération depuis décembre 2016 en vue de la mise en oeuvre du PAN n’avaient pas suffisamment, voire pas du tout, atteint les groupes cibles attendus au sein des entreprises (p.52).
Le Conseil fédéral ignore ce constat et réfute toutes les recommandations émises par l’étude externe visant des étapes claires et une politique cohérente. Alors que l’Allemagne prévoit d’introduire des règles contraignantes si les grandes entreprises ne sont pas au moins 50% d’ici 2020 à avoir introduit une procédure de diligence, le Conseil fédéral mise lui sur une «clarification des attentes» et «l’élaboration d’une stratégie de communication».
Il est révélateur de voir que le Conseil fédéral ne daigne même pas mettre en oeuvre les Principes directeurs de l’ONU au sein des entreprises liées à la Confédération, auprès desquelles il possède une influence directe. L’étude montre d’ailleurs que ces dernières présentent un degré de mise en oeuvre de la diligence plus faible que les autres entreprises.
Les fake-news de Swissholdings
Suite à son communiqué du jour, la fédération des entreprises multinationales Swissholdings a décidé de quitter la table de discussion des partenaires sérieux. Elle affirme que la nouvelle étude montre que 80% des grandes entreprises suisses suivent une politique sérieuse en matière de droits humains. C’est un mensonge éhonté. Premièrement, les auteurs de l’étude écrivent explicitement à la page 28 de leur étude : «Il est particulièrement important de mentionner ici qu’il s’agit d’une étude qualitative, et qu’en raison de la nature de ces données, aucune assertion ne peut être faite sur l’ensemble de l’économie suisse». Deuxièmement, l’enquête en ligne de l’étude (135 participants, dont 20% de multinationales) arrive à une conclusion bien différente. On peut lire à la page 31: «Il est frappant de voir que même parmi les grandes entreprises de plus de 5000 collaborateurs, moins de la moitié ont mis en place des procédés pour évaluer en continu les conséquences de leurs activités en termes de droits humains».
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Chantal Peyer, 079 759 39 30