Droits économiques, sociaux et culturels : la Suisse à la traîne
15 novembre 2010
Depuis que la Suisse a adhéré au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1), elle n’avait fourni qu’un seul rapport en 1996. Pour combler ce retard, dû selon elle à des «causes organisationnelles et financières», la Suisse a soumis simultanément en avril 2008 ses deuxième et troisième rapports officiels. Après examen, le Comité des Nations Unies en charge de veiller au respect du pacte a formulé une série de questions critiques, auxquelles la Suisse a été tenue de répondre, les 5 et 8 novembre derniers. Composé de 18 experts indépendants, ce comité est le seul mécanisme de contrôle susceptible de faire pression sur les Etats parties.Pour la société civile, nombre de ces droits sont encore bafoués en Suisse. En outre, notre pays s’est engagé à veiller à ce que ses activités internationales ainsi que celles de ses entreprises n’entravent pas les droits humains dans des pays tiers. Ces obligations extraterritoriales sont pourtant loin d’être respectées, notamment dans le domaine de la santé et de l’alimentation.
La société civile dénonce les discriminations
En 2009, une coalition d’associations et de syndicats romands s’est constituée afin d’élaborer un rapport parallèle sur le respect du pacte par la Suisse. La DB a contribué à ce rapport (lire en page 5). Il a été remis en septembre dernier au Comité des Nations Unies, dans le but de l’aider à évaluer le dossier suisse sur la base de situations «de terrain». Des exemples sur les transgressions du droit de s’affilier à un syndicat, sur la privation du droit à la santé ou du droit au logement pour les migrants, les sans-papiers ou les demandeurs d’asile déboutés ou encore sur la violation de l’accès pour tous à l’enseignement supérieur, illustrent ce rapport. Celui-ci demande notamment la création de systèmes d’observation plus performants et transparents. A travers ses recommandations, le comité rappelle à la Suisse ses obligations en matière de respect des droits humains, ici et dans les autres pays. La société civile continuera de s’assurer qu’elles ne restent pas lettre morte.
Recommandations
Les associations et les syndicats demandent à la Suisse de:
- Assurer une meilleure coordination et une plus grande cohérence dans sa politique extérieure en matière de santé.
- Respecter le droit des membres de l'OMC d’utiliser pleinement toutes les flexibilités contenues dans l’ADPIC, afin de faciliter l’accès aux médicaments.
- Cesser de chercher à imposer aux pays en développement, à travers des accords bilatéraux de libre-échange ou des négociations plurilatérales, le renforcement de leurs droits de propriété intellectuelle au-delà des obligations de l’ADPIC (pas de dispositions ADPIC+).
- Intervenir lorsque son industrie pharmaceutique s’en prend directement aux droits des Etats d’utiliser les flexibilités prévues dans l’ADPIC.
(1) Avec la Déclaration universelle (1948) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966), le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966) est l’un des trois textes composant la Charte internationale des droits de l’homme. Ce pacte a été ratifié par 159 pays, dont la Suisse en 1992. Bien qu’ils fassent l’objet d’un texte à part, les droits économiques, sociaux et culturels ne peuvent pas être considérés indépendamment de l’ensemble universel, indivisible et interdépendant des droits humains.
Contribution de la DB au rapport parallèle de la coalition suisse romande (novembre 2010)