«La corruption pour les nuls»: Public Eye livre tous les trucs pour tirer le meilleur de la Suisse
Lausanne/Zurich, 14 septembre 2021
Chaque année, les budgets des États sont amputés de quelque 3600 milliards de dollars US à cause de la corruption et du blanchiment d’argent. La Suisse a une part de responsabilité dans ce gigantesque hold-up, dont les premières victimes sont les populations et pays du Sud. 1MDB, Lava Jato ou encore PDVSA: bon nombre de grandes affaires de corruption internationale passent par la Suisse. Les banques qui abritent les avoirs illicites de potentats ou ferment les yeux sur des transactions suspectes ne sont pas les seules impliquées. Des avocat·e·s et fiduciaires suisses jouent aussi un rôle décisif dans la création et l’administration de sociétés-écrans destinées à dissimuler des activités illégitimes ou illégales, comme l’ont montré les Panama Papers et d’autres fuites de données.
Pour secouer les consciences, Public Eye publie aujourd’hui un Petit manuel suisse à usage des criminel·le·s en col blanc: un vadémécum qui passe en revue les failles législatives et autres avantages de la bucolique Helvétie en matière de corruption et de blanchiment d’argent, ainsi que les astuces pour se faufiler entre les mailles de la justice. On y trouve aussi les portraits des «facilitateurs et facilitatrices» de la corruption, à qui il faut s’adresser en Suisse pour camoufler son argent sale et profiter au maximum des défaillances du système. Et puisque l’intégrité de la place financière suisse tant vantée par le Conseil fédéral est un leurre, Public Eye a lancé une action en ligne pour corrompre le ministre des Finances Ueli Maurer, en charge de la lutte contre la criminalité économique. En une semaine, près de 5,9 millions de francs symboliques ont été récoltés pour lui donner envie d’agir contre la corruption «Made in Switzerland». Ces faux billets lui seront remis lorsqu’un juteux pot-de-vin de 20 millions de francs aura été amassé.
Au-delà de la satire, cette campagne est le résultat d’une analyse approfondie des instruments existants pour combattre la corruption et le blanchiment d’argent. Public Eye n’est pas seule à déplorer les failles du dispositif helvétique. Les spécialistes internationaux du Groupe d’action financière (GAFI) et de l’OCDE demandent aussi à la Suisse de combler ses lacunes législatives en la matière. Mais plutôt que d’agir, les autorités helvétiques continuent de s’opposer à toute volonté de réglementation. Au printemps dernier, la majorité bourgeoise du Parlement a refusé d’étendre la Loi sur le blanchiment d’argent (LBA) aux activités de conseil pour les structures offshore, notamment par les avocat·e·s – suivant ainsi le mot d’ordre de leur lobby. Cette disposition, prônée par le GAFI, aurait pourtant permis de leur imposer des devoirs de diligence raisonnable et de faciliter le travail de la justice. En matière de transparence aussi, la Suisse met les pieds au mur, en rejetant la mise en place d’un registre public des ayants droit économiques des sociétés, l’une des mesures les plus efficaces pour lutter contre la criminalité économique.
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